Le pouvoir de la curation

Nous sommes tous noyés sous l’information. Mais avons-nous la bonne, pouvons-nous réduire notre infobésité ? Et si nous étions tous collectivement responsables ?

Une curation bien conçue est une solution à l’infobésité. Disposer seulement (simplement) de l’information la plus pertinente serait idéal mais cela nous paraît impossible. Pourtant, l’information nous vient des autres et nous la donnons aux autres. Elle est donc d’abord un phénomène de collaboration.

Le double entonnoir de la curation

La curation est humaine, faite par des hommes pour des hommes. Certains sont des professionnels, d’autres non. Mais chacun est de fait un double curateur. Il nous faut plusieurs sources (entonnoir amont) d’où nous tirons nos informations (ceux que nous « suivons », nos « influenceurs »). Et nous avons plusieurs débouchés (entonnoir aval) qui sont ceux qui nous suivent et reçoivent nos contenus (nos « suiveurs », nos « abonnés », nos « destinataires »). Nos flux ne dépendent pas toujours de nous, comme par exemple être ou non en CC d’un mail. Ce double entonnoir et les contrôles que nous pouvons exercer sur lui sont notre première responsabilité de curation. Ils concernent la qualité et la quantité de ce qui passe par notre intermédiaire. : avons-nous les bonnes sources en amont ? Sommes-nous de fait des spammers (involontaires ou inconscients) vers l’aval ?

Ces entonnoirs sont bien sur tout aussi importants pour les informations externes à l’entreprise ou à un projet que pour les internes et pour celles qui, par notre intermédiaire, transitent d’un groupe à l’autre. On sait depuis longtemps l’importance des passeurs d’information qui, par leur appartenance à des groupes multiples permettent la perméabilité et la créativité.

La curation est un instrument de pouvoir et de responsabilité

Trier les informations, choisir ses sources, mieux informer ceux qui se reposent sur nous, furent de tous temps des instruments de pouvoir. Le fait que l’information soit largement disponible n’a changé qu’un point : c’est la curation, et non la disponibilité, qui crée le pouvoir et l’influence (même s’il reste certes encore quelques poches où la rétention d’information est encore efficace, ne soyons pas naïfs).

Une bonne curation de contenu génère des idées, des opinions, des points de vue, elle permet ou gêne des process. Elle est source d’influence.

Chacun de nous est de fait un curateur.

Notre curation est toujours liée à notre activité. Le manager aidera son équipe en lui permettant d’être focalisée, il sera un coach quant à l’information. Le responsable de formation aidera les collaborateurs à choisir des MOOCs ou des formations dans la jungle de ce qui est disponible. Chaque collaborateur ne fera idéalement passer que l’information essentielle à son activité.

La responsabilité du curateur est profonde car le bon curateur devra éviter en aval de spammer, de manipuler, d’induire en erreur. Pour cela il devra être lui même, en amont, doté d’un bon esprit critique, avoir fait les choix de ceux dont il s’inspire. Les entonnoirs amont et aval sont étroitement liés.

Pour être efficace, la curation dans une entreprise a besoin de bons curateurs. Elle a aussi besoin – nous dira-t-on- de bons outils mais n’en exagérons pas l’importance, ceux- ci sont plus disponibles que l’esprit critique de chacun.

La curation est confiance

Fondamentalement la curation est donc finalement confiance. Le curateur doit inspirer confiance à ceux qui le suivent car grâce à lui on peut réduire ses sources d’information et son infobésité. Il faut aussi qu’il fasse confiance à ceux qu’il suit car ainsi il ne manquera pas d’information majeure. Enfin, il faut qu’il ait confiance en lui pour savoir en permanence faire le tri entre ses différents fournisseurs, ses différents clients, et la qualité des informations qu’il manipule.

Cet article est également publié dans le numéro de juillet de la revue RH&M.

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