On traduit le mot stakeholders par parties prenantes, quelle erreur ! 

Cette erreur nous rend aveugles au véritable enjeu au cœur de la RSE : respecter tous les éléments de la chaine de création de valeur.

Parties prenantes et stakeholders, une mauvaise traduction

Les parties prenantes « prennent » alors que les stakeholders ont un « stake », un pieu, un intérêt important dans un terrain. Ceux qui prennent reçoivent une part du gâteau, les actionnaires, les salariés, parfois les clients et les fournisseurs. Pourtant, nombreux sont ceux qui sont concernés par le processus de production et qui n’y « prennent » rien, voire à qui l’on prend plutôt qu’on ne donne. En premier lieu bien sûr la nature qui fournit son air, son eau, ses ressources, son énergie fossile. Bien sûr aussi les collectivités locales dans lesquelles les entreprises opèrent, les riverains des usines ou autres établissements, les forêts, les fleuves, la biodiversité qui subissent pressions et dégâts, etc. Et n’oublions pas ceux qui ont un intérêt mais qui ne le savent pas encore, les générations futures auxquelles on laissera de nombreuses friches.

Quand le premier problème de l’humanité est sa survie et l’état dans lequel nos générations laisseront la terre aux suivantes, l’approche par les « parties prenantes » est égoïste. 

Les parties donnantes se réveillent 

Avec l’arrivée de la RSE, des lois sur le climat, le recyclage, l’utilisation des plastiques ou les taxes carbones, un petit bout de chemin a été fait. Avec Greta Thunberg et ses clones une certaine conscience s’éveille. On commence à faire entrer la consommation de valeur dans les considérations de la répartition de la valeur. 

À cela s’ajoute progressivement la possibilité pour certains lieux, comme des fleuves, des forêts ou des territoires, de devenir des personnes morales. Le concept de partie donnante commence à prendre une forme juridique. 

 Mais les avancées sont lentes et pénibles.

Mais comment écouter, quand inclure, comment inclure les parties concernées ?

La critique de l’insuffisance est facile mais que faudrait-il faire ? La question est d’une incroyable difficulté à laquelle tous les stratèges, tous les prospectivistes, tous les conseils d’administration sont désormais confrontés. Elle a deux facettes principales. 

À partir de quand une partie concernée doit-elle être considérée comme suffisamment importante pour que justice soit rendue en lui donnant une écoute ? Quand, au contraire, faut-il seulement la mettre sur une cartographie des parties concernées mais sans lui accorder (encore) de place dans les décisions ? En d’autres termes comment savoir qui est important ? Sur quels critères ? Comment le communiquer ? 

Une fois qu’une partie concernée est jugée importante, comment en tenir compte ? Faut-il mettre au CA un comité des parties prenantes ? Faut-il lui donner une place comme pour les salariés ? Faut-il que la loi l’impose d’une façon ou d’une autre ?

Il est clair que l’intérêt du seul actionnaire n’est plus l’unique boussole des dirigeants. Mais la façon d’organiser le partage des décisions de création et de répartition de la valeur dans un cadre RSE, est loin d’être évidente. Pourtant c’est désormais une nécessité stratégique. 

Le sujet de cette chronique est documenté et expliqué plus longuement dans le dernier livre de Dominique Turcq, « À la recherche du lien social perdu », novembre 2021

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